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Francisco de Goya
1746 - 1828
Peintre Espagnol
  Biographie
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Biographie Francisco de Goya (1746-1828)
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La toile est un exemple typique de composition organique propre au romantisme, où les lignes de forces sont données par le mouvement des personnages, guidées par les
nécessités du thème et non par une géométrie externe imposée a priori par la perspective. Dans ce cas, le mouvement va de gauche à droite, des hommes et des chevaux sont
coupés par les bords du cadre de chaque côté, telle une photographie prise sur le vif. Tant le chromatisme que le dynamisme et la composition anticipent les
caractéristiques de la peinture romantique française ; un parallèle esthétique peut être fait entre le Deux Mai de Goya et La Mort de Sardanapale de Delacroix.
Les Fusillés du 3 mai opposent le groupe de détenu sur le point d’être exécutés avec celui des soldats. Dans le premier, les visages sont reconnaissables et illuminés
par un grand feu, un personnage principal se détache en ouvrant les bras en croix, vêtu de blanc et de jaune irradiant, rappelant l’iconographie du Christ – on voit les
stigmates sur ses mains. Le peloton d’exécution, anonyme, est transformé en une machine de guerre déshumanisée où les individus n’existent plus.
La nuit, le dramatisme sans fard, la réalité du massacre, sont représenté dans une dimension grandiose. De plus, le mort en raccourci au premier plan prolonge les bras
en croix du protagoniste, et dessine une ligne directrice qui va vers l’extérieur du cadre, vers le spectateur qui se sent impliqué dans la scène. La nuit noire,
héritage de l’esthétique du Sublime Terrible, donne une tonalité lugubre aux événements, où il n’y a pas de héros, seulement des victimes : celles de la répression et
celles du peloton.
Dans les fusillés du 3 mai, il n’y a aucune prise de distance, aucune emphase sur des valeurs militaires telles que l’honneur, ni même une quelconque interprétation
historique qui éloignerait le spectateur de la scène : l’injustice brutale de la mort d’hommes des mains d’autres hommes. Il s’agit d’une des toiles les plus importantes
et marquantes de l’ensemble de l’œuvre de Goya, elle reflète, plus qu’aucune autre, son point de vue moderne sur la compréhension d’un affrontement armé.
La Restauration (1815 - 1819) :
Le retour d'exil de Ferdinand VII allait cependant sonner le glas des projets de monarchie constitutionnelle et libérale auxquels Goya adhérait. S'il conserve sa place
de Premier peintre de la Chambre, Goya s'alarme de la réaction absolutiste qui s'amplifie encore après l'écrasement des libéraux par le corps expéditionnaire français en
1823. La période de la Restauration absolutiste de Ferdinand VII entraina la persécution de libéraux et des afrancesados, chez qui Goya avait ses principales amitiés.
Juan Meléndez Valdés et Leandro Fernández de Moratín se virent obligés de s’exiler en France devant la répression. Goya se trouva dans une situation difficile, pour
avoir servi Joseph Ier, pour son appartenance au cercle des Lumières et à cause du procès initié à son encontre en mars 1815 par l’Inquisition pour sa maja desnuda,
qu’elle considérait «obscène», mais le peintre fut finalement absout.
Ce panorama politique obligea Goya à réduire ses commandes officielles aux peintures patriotiques du type « soulèvement du deux mai » et aux portraits de Ferdinand VII.
Deux d’entre eux (Ferdinand VII avec un manteau royal et en campagne), tous deux de 1814 sont conservés au musée du Prado.
Il est probable qu’à la restauration du régime absolutiste Goya eut dépensé une grande partie de ses avoirs pour faire face aux pénuries de la guerre. C’est ainsi qu’il
l’exprime dans des échanges épistolaires de cette époque. Cependant, après la réalisation de ces portraits royaux et d’autres commandes payées par l’Église à cette
époque – notamment Saintes Juste et Rufine (1817) pour la Cathédrale de Séville — en 1819, il avait suffisamment d’argent pour acheter sa nouvelle propriété de la
« maison du sourd », de la faire restaurer, de lui ajouter une noria, des vignes et une palissade.
L’autre grand tableau officiel – plus de quatre mètres de large – est celui de La Junta de Filipinas (Musée Goya, Castres), commandé en 1815 par José Luis Munárriz,
directeur de cette institution et que Goya peignit à la même époque.
Cependant, en privé, il ne réduisit pas son activité de peintre et de graveur. Il continua à cette époque à réaliser des tableaux de petit format, de caprices, autour de
ses obsessions habituelles. Les tableaux s’éloignent toujours plus des conventions picturales antérieures, par exemple avec : la Corrida de toros, la Procession des
pénitents, Tribunal de l'Inquisition, maison de fous. On note l’enterrement de la sardine que traite du Carnaval.
Ces huiles sur bois sont de dimensions similaires (de 45 à 46 cm x 62 à 73, sauf L’enterrement de la sardine, 82,5 x 62) et sont conservées au musée de l’Académie royale
des beaux-arts de San Fernando. La série provient de la collection acquise par le régisseur de la ville de Madrid à l’époque du gouvernement de Joseph Bonaparte, le
libéral Manuel García de la Prada, dont le portrait par Goya est daté 1805 et 1810. Dans son testament de 1836 il légua ses œuvres à l’académie des beaux-arts qui les
conserve encore. Elles sont en grande partie responsables de la légende noire, romantique, créée à partir des peintures de Goya. Elles furent imitées et répandues,
d’abord en France puis en Espagne par des artistes comme Eugenio Lucas et Francisco Lameyer.
En tout cas, son activité resta frénétique, puisque durant ces années il termina les Désastres de la guerre, et commença une autre série de gravure, La Tauromaquia
—mise en vente dès octobre 1816—, avec quoi il pensait obtenir de plus grands revenus et un accueil populaire meilleur qu’avec les précédentes. Cette dernière série est
conçue comme une histoire du toréro qui recrée ses mythes fondateurs et où prédomine le pittoresque malgré de nombreuses idées originales, comme celles de l’estampe
numéro 21 « Disgrâces survenues aux arènes de Madrid et mort du maire de Torrejon » où la zone gauche de l’estampe est vide de personnages, dans un déséquilibre
impensables à peine quelques années avant.
Dès 1815 —bien qu’elles ne furent publiées qu’en 1864— il travailla aux gravures disparates. C’est une série de vingt-deux estampes, probablement incomplètes, dont
l’interprétation est la plus complexe. Les visions sont oniriques pleines de violence et de sexe, les institutions de l’ancien régime sont ridiculisée et sont en
général, très critiques envers le pouvoir. Mais plus que ces connotations, ces gravures offrent un monde imaginaire riche en relation avec le monde de la nuit, le
carnaval et le grotesque. Finalement, deux tableaux religieux émouvant, peut être les seuls de réelle dévotion, achèvent cette période. Ce sont La dernière communion de
saint Joseph de Calasanz et le Christ sur le mont des oliviers, tous deux de 1819, exposés au Musée Calasancio de l’école pieuse de San Antón de Madrid. Le recueillement
réel que montrent ces toiles, la liberté de trait, la signature de sa main, transmettent une émotion transcendante.
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