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Edouard Manet
1832 - 1883
Peintre Français
  Biographie
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Biographie Edouard Manet (1832-1883)
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Portraits féminins :
Fanny Claus, amie de Manet et de son épouse Suzanne, future femme du peintre Pierre-Ernest Prins (Manet fut témoin à leur mariage), mourut de la la tuberculose à l’âge
de 30 ans, soit neuf ans après l’exécution de cette toile (Portrait de Mademoiselle Claus). Elle est ici représentée assise alors que dans l’œuvre définitive
(Le balcon), elle se tient debout à droite.
Antonin Proust, qui fréquentait Manet depuis l’enfance, avait l’avantage de connaître intimement son caractère : selon lui, même au plus fort de la maladie du peintre,
« la présence d’une femme, n’importe laquelle, le remettait d’aplomb ». Édouard Manet, en grand amateur de femmes qu’il était, en vint naturellement à peindre la gent
féminine en abondance. Bien loin de se limiter aux seules Suzanne Leenhoff et Victorine Meurent, le peintre a immortalisé les traits d’un grand nombre de ses amies.
Ainsi, dans La Prune (voir face au sommaire), l’actrice Ellen Andrée pose complaisamment dans un décor de café, et semble figée dans une rêverie douce et mélancolique.
Dans la droite lignée d’Olympia, Manet se plaît également à représenter sans faux-semblant la vie de plusieurs courtisanes ou « créatures » entretenues, la plus célèbre
en ce domaine étant Nana. Cette toile, qui date de trois ans avant la parution du roman homonyme de Zola, reprend avec beaucoup plus de légèreté et de futilité le thème
de la grave Olympia, sous les traits de l’actrice Henriette Hauser. Le titre pourrait avoir été donné par Manet postérieurement à la réalisation du tableau, lorsqu’il
apprit le titre du prochain ouvrage de Zola. Une autre explication voudrait que Manet ait été inspiré par le roman L'Assommoir, dans lequel une Nana encore toute jeune
fille fait sa première apparition, et reste précisément « des heures en chemise devant le morceau de glace accroché au-dessus de la commode ». Le tableau, comme il se
doit, fut refusé au Salon de Paris de 1877.
   - Victorine Meurent : la Femme selon Manet :
Le visage de Victorine Meurent, aisément reconnaissable, est celui qui revient le plus régulièrement dans l’œuvre de Manet. Le peintre, subjugué par la beauté fraîche et
un peu insolente de la jeune femme, en fait très rapidement son modèle préféré, notamment pour ses peintures de nu. Victorine apparaît ainsi dans les tableaux les plus
célèbres de Manet : en premier lieu dans Le Déjeuner sur l'herbe, bien sûr, où elle est dépeinte assise et entièrement dévêtue. La mystérieuse Olympia, de même, n’est
autre que Victorine. Édouard Manet, dans chacun de ces deux cas, altère légèrement les traits de la jeune femme pour qu'ils correspondent mieux avec l’idée qu’il se fait
de la toile à accomplir.
À ceux qui auraient pu reprocher au peintre de ne réaliser que des nus lascifs et provocants de sa jeune égérie, Manet répond par deux très beaux portraits d’une
Victorine habillée de pied en cap. Dans La Chanteuse de rue, Manet déguise son modèle en une modeste chanteuse sortant d’un cabaret à la nuit tombée et dégustant
étrangement quelques cerises. La Femme au perroquet avec son petit bouquet de violettes, quant à elle, est surtout un clin d’œil à une toile homonyme de Gustave Courbet
représentant une femme nue avec un perroquet.
Plus de dix années après la grande époque des scandales, c’est sans doute pour rendre hommage à leur longue relation artistique et amoureuse qu’Édouard Manet réalise un
dernier portrait de Victorine, Le Chemin de fer, où l’ancienne femme libérée s’est métamorphosée en une dame parfaitement respectable tenant compagnie à une petite
fille, devant la gare Saint-Lazare. Cette œuvre, marquée par le symbole de la grille en fer, semble tirer un trait sur le passé avec une certaine amertume, et le chat
inquisiteur d’Olympia laisse place à un petit chien sagement endormi. Cependant, dès cette époque, la santé de Manet devient précaire.
Amitiés littéraires :
Alors même qu’il n’était encore qu’un jeune peintre, Édouard Manet avait déjà conquis l’amitié de Charles Baudelaire. Les deux hommes se rencontrent dès 1859 dans le
salon du commandant Lejosne, ami de la famille Manet. Bien que Baudelaire n’ait jamais écrit publiquement pour soutenir son ami, y compris pendant le scandale du Salon
des Refusés de 1863, il tient le talent du jeune homme en haute estime dès la présentation du Buveur d'absinthe. Comme il l’avait noté en 1865, peu avant sa mort,
« il y a des défauts, des défaillances, un manque d’aplomb, mais il y a un charme irrésistible. Je sais tout cela, je suis un des premiers qui l’ont compris ».
L’amitié de Charles Baudelaire a été particulièrement bénéfique à Manet après la présentation d’Olympia : le peintre avait été abattu par les critiques féroces qui lui
avaient été adressées, et en avait touché un mot à son ami, alors à Bruxelles. La lettre mémorable que Baudelaire envoie en réponse est à la fois ferme et amicale :
invitant Manet à faire taire son orgueil, le poète relativise la portée de ces attaques par rapport à celles dont d’autres grands artistes sont victimes. Manet n’est
somme toute « que le premier dans la décrépitude de [son] art ». Ce commentaire corrosif, dans la bouche d’un poète fasciné par le thème de la décadence, est bien sûr
en réalité un compliment. La mort de Baudelaire, survenue prématurément en 1867, a été un coup rude pour Manet et sa femme Suzanne, qui perdaient à la fois un protecteur
et un ami.
C’est à cette époque qu’Édouard Manet reçoit le soutien d’un jeune auteur de vingt-six ans, Émile Zola. Ce dernier, révolté par le refus opposé au Joueur de fifre pour
le Salon officiel de 1866, publie la même année un article retentissant dans L’Événement, dans lequel il prend la défense du tableau. L’année suivante, Zola va jusqu’à
consacrer une étude biographique et critique très fouillée à Édouard Manet, afin de permettre la « défense et illustration » de sa peinture, qu’il qualifie de « solide
et forte ».
Manet en est très reconnaissant envers son nouvel ami, et il réalise dès 1868 le Portrait d'Émile Zola, accepté au Salon de la même année. La toile contient plusieurs
éléments anecdotiques et discrets révélant l’amitié des deux hommes : outre la reproduction d’Olympia accrochée au mur, et dans laquelle le regard de Victorine Meurent a
d’ailleurs été légèrement modifié par rapport à l’original afin de fixer Zola, on distingue sur le bureau le livre bleu-ciel que l’écrivain avait rédigé pour défendre
Manet. L’entente entre les deux hommes, toutefois, ne durera pas : de plus en plus perplexe face à l’évolution impressionniste que connaissait le style de Manet, bien
loin du réalisme qu’il prisait, Zola finit par rompre tout contact.
Plus tard dans sa vie, Manet retrouvera chez un homme de lettres l’amitié profonde et spirituelle qu’il avait ressentie pour Baudelaire, en la personne de Stéphane
Mallarmé. Ce dernier, plus jeune de dix ans, ressent une telle admiration pour l’art de Manet qu’il publie à Londres, en 1876, un article élogieux à son sujet, en
anglais. Dans ce texte, intitulé Les Impressionnistes et Édouard Manet, Mallarmé prend la défense de son compatriote, et en particulier du tableau Le Linge, une
représentation sans prétention d’une jeune femme des Batignolles lavant son linge, œuvre refusée au Salon car mêlant un thème trivial et un style impressionniste. Manet
exécute en retour un Portrait de Stéphane Mallarmé dont Georges Bataille, déclare « qu'il est le plus heureux de la peinture.» Paul Valéry associait ce qu'il appela
« le triomphe de Manet » à la rencontre de la poésie, en la personne de Baudelaire d'abord, puis de Mallarmé. »
Suite page 7
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